vendredi 30 décembre 2011

Goélands migrateurs et urubu sédentaire

À peine étions-nous remis des émotions fournies par l’urubu de Bernard que nous avions encore une fois le fleuve Saint-Laurent en tête. La température variant énormément depuis quelques jours, le fleuve n’était pas encore gelé lorsque nous sommes allés faire une tournée à Rivière-Ouelle lundi le 26 décembre. Un bon vent soufflait cependant du nord-ouest; ça signifie qu’au quai, nous avions le vent directement en plein visage. Si l’on cherche à s’abriter du vent, il nous est impossible de voir au large… Que faire? La décision fut plutôt facile à prendre : nous avons donc décidé de caler la tête entre les épaules et d’endurer le vent! Mais, au moins, il y avait des oiseaux!
Ce matin-là, en effet, de nombreux goélands se déplaçaient devant le quai en provenance de l’estuaire. Il arrive régulièrement que de tels mouvements de laridés soient notés certaines journées en décembre, mais il me reste encore à trouver ce qui peut bien les provoquer… Les mouvements des glaces? Les changements de température? Une marée montante ou descendante?…

Probablement encore attirés par la rareté présente à La Pocatière (…), nous avons écourté notre promenade à Rivière-Ouelle à près de deux heures, ce qui nous a tout de même permis de voir :
  • 10 Grands Harles
  • 1 Autour des palombes – Un adulte
  • 5 Goélands à bec cerclé – Ma mention la plus tardive dans la région, battant le 25 décembre de l’an dernier et le 24 décembre de 2006!
  • 4 Goélands argentés
  • 350 Goélands arctiques
  • 6 Goélands bourgmestres
  • 37 Goélands marins
  • 1 Guillemot à miroir
  • 25 Pigeons bisets
  • 2 Harfangs des neiges
  • 1 Pie-grièche grise
  • 1 Geai bleu
  • 24 Corneilles d’Amérique
  • 17 Grands Corbeaux
  • 70 Étourneaux sansonnets
  • 60 Plectrophanes des neiges
À noter aussi plusieurs Phoques du Groenland, une autre espèce de l’estuaire présente dans la région depuis peu.
Nous n’avons pas résisté à la tentation de retourner chez notre copain Bernard afin de revoir son Urubu noir. Le célèbre oiseau s’est présenté à sa mangeoire quelques minutes après notre arrivée et a commencé à s’empiffrer joyeusement sous nos yeux.

L’Urubu noir à sa mangeoire, tel que vu de la route – La Pocatière – 26 décembre 2011 © Claude Auchu
Les jours suivants n’ont pas permis d’effectuer les belles sorties prévues. La température pouvait monter jusqu’à 4°C une journée pour redescendre jusqu’à –20 le lendemain! Et les vents (parlons-en des vents!), ils ont été presque constants et ont soufflé jusqu’à 70 km/h mercredi et jeudi! Bref, pas le genre de journées que l’on espérait pour nos vacances.

Heureusement, vendredi le 30 décembre fut une très belle journée froide mais sans vent. Nous étions bien curieux de voir si l’Urubu noir, qui n’avait pu visiter sa mangeoire la veille à cause des vents, avait pu survivre aux –17°C de la nuit précédente. Bernard était fidèle à son poste à notre arrivée vers 8 h 00 et c’est ensemble que nous avons monté la garde. Le temps passait et on s’encourageait en parlant de la capacité qu’ont les urubus à se gaver lorsque la nourriture est abondante en prévision des journées de vache maigre. Il n’y a donc pas de raison pour que l’urubu de Bernard ait rendu l’âme après deux petites journées à –20°C, surtout après avoir mangé comme il l’a fait certaines journées… du moins, c’est ce que l’on espérait.
Le temps passait et, plus d’une heure après notre arrivée, le voilà enfin qui apparaît, venant du boisé qui semble être son dortoir! Il s’est approché doucement de nous pour se poser dans un grand peuplier en bordure de la route. Il semblait en grande forme et s’est même permis un brin de toilette. Ses grandes pattes étaient à découvert et, même s’il a jeté un vague coup d’œil à sa mangeoire en passant, il ne semblait pas vraiment pressé d’aller se nourrir. Finalement, après 20 minutes de nettoyage à regarder passer les voitures sous lui, l’urubu s’est élancé vers son bloc de gras attaché à une branche dans un champ. Il s’y est alimenté goulûment jusqu’à notre départ, sans être dérangé. Deux Étourneaux sansonnets se sont perchés sur la branche retenant le lunch, mais l’urubu n’a pas bronché!

Nous avons par la suite visité certains sites situés à proximité où nous avons pu ajouter :
  • 1 Buse pattue
  • 9 Geais bleus
  • 2 Sittelles à poitrine blanche – Elles sont beaucoup plus rares cet hiver qu’au cours des dernières années.
  • 9 Jaseurs boréaux
  • 17 Jaseurs d’Amérique
Jusqu’à maintenant, tout semble indiquer que nous ne commencerons pas notre année 2012 en visitant les forêts de conifères de l’arrière-pays comme nous le faisons depuis des années. Vous vous doutez bien que le 1er janvier 2012, nous débuterons notre année ornithologique en essayant d’ajouter une première rareté à notre liste annuelle : l’Urubu noir!

mardi 27 décembre 2011

L'urubu de Bernard

J’ai connu mon vieux copain Bernard à la fin des années 1970, à l’époque où il roulait dans un Jeep Renegade. Je savais déjà que c’était un chasseur et un amateur de plein-air, mais ce n’est que quelques années plus tard que j’ai appris qu’il observait aussi les oiseaux. Le plus lointain souvenir que j’ai d’une conversation ornithologique avec Bernard remonte au début de l’hiver 1982-83, alors que je lui avais expliqué la présence d’une Paruline des pins qui tentait à ce moment d’hiverner à la mangeoire du cégep de La Pocatière. Au cours des années suivantes, mes rencontres avec Bernard dans un but ornithologique se sont faites de plus en plus fréquentes au point où, près de 30 ans plus tard, il est la personne avec qui j’ai passé le plus de temps à observer les oiseaux (en dehors de ma compagne Christiane, bien entendu!).
Bernard est cependant un observateur plus occasionnel que nous et nous pouvons parfois passer des mois sans avoir de ses nouvelles avant de le croiser par hasard et qu’il replonge tête première dans le birding. Cette habitude d’observer les oiseaux par séquence ne l’a tout de même pas empêché de se lever à 1 heure du matin le 25 août 1989 afin d'aller faire une traversée entre Matane et Godbout et de revenir à La Pocatière la même journée. Cette traversée nous avait d’ailleurs permis de voir pas moins de sept Puffins des Anglais, nos premiers à vie! Un bien beau souvenir qui montre bien à quel point Bernard peut être prêt à tout lorsqu’il est dans une lançée ornithologique!
Bernard est un observateur très prudent (trop?) et le manque de confiance en lui nous permet d’être sûrs que s’il dit avoir vu une espèce, c’est parce qu’il a vérifié et revérifié afin d’être certain d’avoir éliminé toutes les autres possibilités. À de nombreuses reprises, au quai de Rivière-Ouelle, je sentais la fébrilité monter en lui lorsque, ayant repéré une espèce particulière se dirigeant vers nous, je lui lançais : « Tiens, Bernard, elle est pour toi celle-là; qu’est-ce que c’est? ». Maintenant, Bernard s’est mis sérieusement à la photographie et ses sujets de prédilection sont, bien sûr, les oiseaux!
Et bien, voilà, mon vieux copain Bernard vient de trouver l’espèce de sa carrière! Jeudi le 22 décembre dernier, en ouvrant l’ordinateur, j’ai reçu un courriel de Bernard me disant qu’en fin d’après-midi, il avait photographié en vitesse un urubu non-identifié derrière chez-lui à La Pocatière! Pour moi, un urubu que Bernard n’osait pas identifier à la mi-décembre avait de fortes chances d’être un Urubu noir!!! Et sa photo le prouvait bien! Voilà, Bernard était sur une autre lancée ornithologique!

Vendredi le 23 décembre, tôt le matin, nous étions déjà quelques-uns chez Bernard à attendre sous la neige et le vent l’arrivée de son urubu. En ce début des vacances des Fêtes, ayant d’autres obligations, nous avons dû quitter le site vers 10 h 00 avant que la vedette ornithologique ne se présente sur place. Finalement, l’urubu est arrivé vers 14 h 15, mais il est reparti s’abriter des bourrasques de neige avant notre retour. Mais, nous allions nous reprendre…

Entre-temps, il y avait aussi d’autres oiseaux à trouver à La Pocatière. Ainsi, samedi le 24 décembre, n’ayant que l’avant-midi de disponible pour le birding, nous avons fait une rapide tournée des mangeoires de la ville. La température plutôt fraîche de la matinée (-18°C) et les 7-8 centimètres de neige tombés la veille semblaient avoir rendu les oiseaux plutôt fébriles. Il y avait enfin quelques oiseaux aux mangeoires et dans les arbres fruitiers. Cette promenade de trois heures nous a fourni :
  • 3 Goélands arctiques
  • 90 Pigeons bisets
  • 34 Tourterelles tristes
  • 3 Pics mineurs
  • 2 Pics chevelus
  • 2 Geais bleus
  • 20 Corneilles d’Amérique – L’an dernier, très peu de corneilles avaient osé hiverner ici à cause du peu de nourriture naturelle disponible. C’est rassurant de voir que les choses sont revenues à la normale.
  • 2 Grands Corbeaux
  • 24 Mésanges à tête noire
  • 3 Sittelles à poitrine rousse
  • 1 Merle d’Amérique
  • 75 Étourneaux sansonnets
  • 35 Jaseurs d’Amérique
  • 1 Plectrophane des neiges
  • 2 Juncos ardoisés – Ils ne fréquentaient même pas une mangeoire!
  • 1 Quiscale bronzé – Lui a été trouvé près d’une mangeoire dans la ville.
  • 1 Bec-croisé bifascié
  • 55 Chardonnerets jaunes – Une belle quantité!
  • 40 Moineaux domestiques
Finalement, même si nous n’avions pas vraiment prévu rendre visite à Bernard aussi tôt le matin de Noël, dimanche le 25 décembre, peu après le lever du soleil, nous étions déjà chez lui à attendre l’arrivée de l’urubu. Encore une fois, la température était carrément froide et un bon vent soufflait du sud-ouest. Nous avons dû attendre l’oiseau-vedette durant près d’une heure, mais lorsqu’il a daigné de présenter, ce fut pour nous donner un beau spectacle! Fidèle à son habitude, l’urubu est arrivé du boisé situé au nord de la route pour aller se poser dans un grand peuplier près des habitations. Après s’être laissé photographier, l’oiseau a changé d’arbre pour se coucher littéralement sur une branche. À ce moment, il nous semblait vraiment en mauvaise état et je n’aurais pas été surpris de le voir dégringoler de l’arbre « raide mort »… Mais non! Nous nous sommes lassés avant lui et, de toute façon, après les photos, une petite séance de dégel de doigts s’imposait.

À ce moment, nous croyions bien sa dernière heure venue! À noter son oeil gauche amoché.
Urubu noir – La Pocatière – 25 décembre 2011 © Claude Auchu

Mais, finalement, il nous a présenté le meilleur côté de sa personnalité!
Urubu noir – La Pocatière – 25 décembre 2011 © Claude Auchu
Bien au chaud chez Bernard, nous avons discuté paisiblement de ce qui avait bien pu pousser l’Urubu noir jusqu’à La Pocatière. Finalement, après une demi-heure, Bernard en regardant par la fenêtre nous a annoncé : « Il n’est plus dans l’arbre! ». Rapidement, nous sommes sortis à l’extérieur et nous avons décidé de vérifier s’il n’était pas descendu près des bâtiments de la ferme du voisin en quête de nourriture. Bien entendu, l’idée première était surtout d’éviter à tout prix d’effrayer l’oiseau, en particulier s’il était au sol à se nourrir, ce qui devait être particulièrement important pour lui en cette journée froide. Après un long détour, nous avons finalement trouvé un endroit d’où jeter un coup d’œil à l’arrière des bâtiments de ferme et, bingo!, il était là!!! Les appareils photographiques se sont mis à l’œuvre et nous avons pu documenter la voracité et l’état de santé rassurant de l’urubu! Nous avons cependant remarqué que le pauvre oiseau avait l’œil gauche en très mauvais état, il est même probable qu’il ne peut plus s’en servir…

Urubu noir – La Pocatière – 25 décembre 2011 © Claude Auchu

Urubu noir – La Pocatière – 25 décembre 2011 © Claude Auchu
Finalement, les bruits de la ferme et particulièrement une planche de la grange qui battait au vent ont fait fuir notre oiseau. C’est à ce moment que nous nous sommes rendus compte des problèmes que pouvait rencontrer l’urubu à cet endroit. Le va-et-vient des propriétaires des lieux qui doivent malgré tout continuer leur travail, les chiens des alentours qui fouillent dans les entrailles dont se nourrit l’urubu et la difficulté pour les observateurs de le voir s’alimenter nous ont donné l’idée de créer une mangeoire à urubu! Une partie de la nourriture disponible fut donc installée au milieu d’un champ, bien accrochée à de grosses branches afin que les renards et les coyotes des parages ne partent pas avec le lunch durant la nuit.

Urubu noir – La Pocatière – 25 décembre 2011 © Claude Auchu
Mais est-ce que l’Urubu noir allait accepter facilement de se nourrir à ce nouvel emplacement? Et combien de temps allait-il prendre avant de le trouver? La réponse ne fut pas longue à venir : nous avons terminé l’installation à 11 h 15 et, à 14 h 00, l’urubu s’y alimentait déjà! Il y est même resté jusqu’à 16 h 00 et pour y revenir à 7 h 15 le lendemain. L’urubu peut maintenant se nourrir en voyant tout autour de lui et les observateurs le voient facilement de loin. Tout le monde est gagnant!!!

Son dîner de Noël!
Urubu noir – La Pocatière – 25 décembre 2011 © Claude Auchu
Qu’est-ce qui a bien pu pousser cet Urubu noir (et un autre présent à Saint-Louis-du-Ha-Ha depuis deux semaines) jusqu’à nous? La prédominance des vents du sud-ouest l’automne dernier peut-il en être la cause? Probablement pas. Depuis plusieurs années, cette espèce pousse de plus en plus loin au nord la limite de son aire de nidification. Il niche possiblement déjà jusque dans l’extrême sud du New Hampshire. Et, comme l’Urubu à tête rouge l’a fait un demi-siècle avant lui, il commence à visiter régulièrement le sud du Québec, possiblement à la recherche de nouveaux territoires. Il existe présentement près de 50 mentions au Québec dont une trentaine depuis 20 ans! Plusieurs de ces mentions proviennent de la Gaspésie, souvent tard en automne et même en hiver, montrant qu’ils visent vraiment le nord-est durant ces expéditions.

Urubu noir – La Pocatière – 26 décembre 2011 © Claude Auchu
Quelles sont les chances pour l’oiseau de Bernard de survivre à l’hiver? Pratiquement nulles à mon avis! Certains oiseaux qui ont séjourné en Gaspésie ont pu résister jusqu’à la mi-janvier, mais ils doivent faire face à la température froide et à la neige qui cache leur nourriture. En plus, un urubu peut facilement devenir la proie d’un grand-duc durant la nuit. Mais, bien sûr, il y a une première à tout! Souhaitons bonne chance à l’urubu de Bernard!
Cet Urubu noir constitue la deuxième mention de l’espèce à La Pocatière, Christiane et moi en avions croisé un en plein déplacement le 30 avril 2005. Un autre urubu avait aussi été vu à Saint-André-de-Kamouraska le 23 juillet 1998. Une petite anecdote : le troisième oiseau trouvé au Québec avait été abattu à Beauport le 20 août 1932 et ce spécimen est présentement exposé au Musée François-Pilote, ici, à La Pocatière!!!
Mon vieux copain Bernard Desmeules est devenu le Père Noël pour plusieurs ornithologues québécois cette année. C’est vraiment l’oiseau de sa carrière et je vous assure qu’il ne l’oubliera pas de sitôt!

lundi 19 décembre 2011

Derniers canards, harfangs et Jaseurs d'Amérique

Les jours les plus courts de l’année arrivent toujours en même temps que le début de la période des excursions les plus courtes! Les derniers migrateurs quittent la région et, avec l’arrivée des premiers grands froids, il est de plus en plus difficile d’étirer nos sorties ornithologiques sur six heures ou plus comme nous réussissions à le faire il y a un mois à peine.
Pour la fin de semaine dernière, nous avions le choix entre aller à Rivière-Ouelle samedi avec un vent de 15 km/h du nord-ouest ou attendre dimanche avec un vent de même force mais soufflant du sud-ouest. Si vous suivez mon blog depuis un certain temps, vous avez sans doute remarqué que je ne raffole pas vraiment des vents du sud-ouest. La décision fut donc facile à prendre…

Au lever du soleil, samedi le 17 décembre, Christiane et moi avons donc pris la route de Rivière-Ouelle. Après une semaine très douce qui a d’ailleurs permis au peu de neige au sol de fondre presque entièrement, un petit coup de froid était prévu pour la fin de semaine avec une température oscillant entre -15 et -7°C. C’est donc dans cet environnement étrange d’une température froide mais sans neige au sol que nous nous sommes présentés au quai de Rivière-Ouelle.
Comme il arrive souvent (et le contraire se produit parfois aussi…), le vent qui soufflait à peine à La Pocatière 15 minutes plus tôt nous a surpris par sa force (et sa froideur!) une fois rendu au quai. L’observation efficace sans protection contre le vent était à peu près impossible et nous avons donc dû trouver un endroit abrité afin de pouvoir scruter le large.

En luttant contre le vent, le froid et la mauvaise visibilité, nous avons tout de même réussi à voir :
  • 3 Canards noirs
  • 15 Eiders à duvet
  • 1 Macreuse brune
  • 1 Grand Harle
  • 1 Plongeon huard
  • 1 Pygargue à tête blanche – Un bel adulte se dirigeait vers le sud-ouest en longeant le fleuve.
  • 5 Goélands à bec cerclé
  • 8 Goélands argentés
  • 35 Goélands arctiques
  • 1 Goéland bourgmestre
  • 10 Goélands marins
  • 1 Guillemot à miroir
  • 18 Pigeons bisets
  • 15 Tourterelles tristes
  • 1 Harfang des neiges
  • 1 Geai bleu
  • 37 Corneilles d’Amérique
  • 6 Grands Corbeaux
  • 50 Étourneaux sansonnets
  • 11 Plectrophanes des neiges
  • 23 Becs-croisés bifasciés
  • 9 Sizerins flammés
En arrivant à La Pocatière, nous avons eu la surprise de voir un groupe de 60 Bernaches du Canada en vol au-dessus de l’autoroute 20! Une telle quantité de bernaches peut paraître ridiculement basse aux observateurs du sud-ouest de la province, mais localement, il s’agit d’une mention très tardive et la présence de 60 oiseaux ici à la mi-décembre est carrément exceptionnelle! D’ailleurs, les sept premières espèces de la liste ci-haut nous auraient comblé il y a une vingtaine d’années lorsque j’organisais le recensement des oiseaux de Noël de la région. À cette époque, voir une seule espèce de canard dans la région à la mi-décembre représentait tout un exploit et dénicher un Goéland à bec cerclé demandait chance et persévérance. Et trouver un pygargue adulte comme celui de samedi représentait tout simplement un fantasme! Il est donc intéressant de voir à quel point les populations d’oiseaux changent au fil des années, de là l’importance de tels inventaires d’oiseaux ou, mieux encore, de remplir des feuillets d’observations quotidiennes (que l’on peut faire plus qu’une seule journée par année!).
Vous pouvez facilement avoir accès aux résultats de nos recensements de Noël sur le site internet de la Société Audubon en inscrivant le code du recensement (QCLP) et les années du début (1989-90) et de la fin de l’inventaire (1995-96). En y jetant un coup d’œil tout à l’heure, je vous assure que toutes sortes de souvenirs me sont revenus en tête!

La journée de dimanche le 18 décembre fut encore plutôt froide que samedi mais, heureusement, sans les vents du sud annoncés. Nous avons décidé de faire notre traditionnelle tournée hivernale de la ville et de ses mangeoires. Peut-être est-ce dû à l’abondance de nourriture naturelle ou encore à l’absence de neige au sol, mais les mangeoires, même celles les mieux situées, étaient désertes. Les fringillidés qui avaient fait une belle présence en octobre ont continué leur chemin (ou encore se sont réfugiés dans les forêts de conifères) et sont maintenant très difficiles à dénicher.

Durant les presque cinq heures qu’a durée notre promenade, nous avons observé :
  • 1 Goéland argenté
  • 8 Goélands arctiques
  • 2 Goélands marins
  • 32 Pigeons bisets
  • 13 Tourterelles tristes
  • 4 Harfangs des neiges – En fait, deux de ces harfangs étaient sur le territoire de Rivière-Ouelle, mais facilement repérés depuis un point d’observation provilégié à La Pocatière. L’oiseau le plus loin se trouvait à 8,5 kilomètres de nous! Les harfangs sont souvent très abondants dans la région : durant le recensement de Noël du 14 décembre 1991, nous en avions compté 37!!!
  • 1 Pic mineur
  • 2 Geais bleus
  • 13 Corneilles d’Amérique
  • 5 Grands Corbeaux
  • 22 Mésanges à tête noire
  • 5 Sittelles à poitrine rousse
  • 1 Merle d’Amérique
  • 160 Étourneaux sansonnets
  • 35 Jaseurs d’Amérique – Un bon nombre pour cette espèce qui n’est pas présente à chaque hiver dans la région.
  • 1 Plectrophane des neiges
  • 12 Chardonnerets jaunes
  • 4 Moineaux domestiques
L’hiver qui commencera officiellement dans quelques jours s’annonce plutôt imprévisible. L’abondance de nourriture naturelle disponible trouvera sûrement preneur tôt ou tard. Les fringillidés que l’on espérait depuis longtemps peuvent donc se présenter à tout moment. Espérons que ce sera au début de janvier plutôt qu’à la fin de février afin que l’on puisse allonger nos excursions au même rythme que la durée des journées!

lundi 12 décembre 2011

En cherchant un certain fuligule...

Je ne me considère pas vraiment comme un cocheur, c’est-à-dire un observateur d’oiseaux prêt à parcourir des dizaines, des centaines voire des milliers de kilomètres afin d’ajouter une nouvelle espèce à sa liste. Il faut avouer que c’est en grande partie pour satisfaire ce genre de passion dévorante qu’existent les sites internet et les lignes téléphoniques annonçant la présence d’oiseaux rares aussitôt qu’ils sont découverts. Pour ma part, si je consulte régulièrement l’excellente Page des oiseaux rares du Québec, c’est surtout pour savoir quels oiseaux circulent dans la province (en particulier les espèces
« invasives »), dans l’espoir d’en trouver un exemplaire dans ma région. C’est pour cette même raison que je jette des coups d’œil réguliers à mes vieux magazines ornithologiques afin de me remémorer les dates, les conditions météorologiques ou autres, susceptibles de pousser certaines espèces jusque dans ma région.

Justement, il y a présentement une belle présence de Fuligules à dos blanc dans l’ouest du Québec et, je dois l’avouer, le peu de temps dont je disposais pour observer les oiseaux samedi le 10 décembre a été en bonne partie consacrée à chercher cette espèce. Peine perdue, je n’ai même pas réussi à voir un seul canard! Même durant ses meilleures années (ses visites au Québec ont diminué de façon marquée depuis 25 ans), le Fuligule à dos blanc n’a probablement jamais été une espèce annuelle dans la région de La Pocatière. Personnellement, je n’ai observé l’espèce qu’à quatre reprises dans la région. Et j’aurais bien aimé en ajouter une cinquième… J’ai tout de même été en mesure de constater que le Goéland arctique a repris sa place de « goéland le plus commun en hiver ».
Durant ma visite aux étangs d’épuration de la ville, j’ai pu voir :
  • 3 Goélands à bec cerclé
  • 12 Goélands argentés
  • 45 Goélands arctiques
  • 1 Goéland bourgmestre
  • 12 Goélands marins
  • 250 Étourneaux sansonnets
  • 50 Plectrophanes des neiges
Si un Fuligule à dos blanc se présente dans la région de La Pocatière en décembre, il y a de fortes chances que ce soit sur des étangs d’épuration qu’il soit trouvé, en bonne partie parce qu’ils sont les seuls étangs encore dégelés. Les lacs et étangs naturels sont très rares par ici et ils se recouvrent de glace très rapidement. Bien sûr, il reste le fleuve… Mais, dans la région, le fleuve agit plutôt comme une autoroute où, surtout tard en saison, les oiseaux aquatiques n’utilisent que très rarement les nombreuses baies comme haltes routières. Il faut donc un bonne dose de chance pour être au bon endroit juste au moment où le fuligule tant espéré décide de passer…!

Le lendemain matin, dimanche le 11 décembre, c’est sous une lune bien ronde et bien froide que nous avons pris la route de Rivière-Ouelle. Encore plus que durant nos dernières visites dans cette municipalité, j’avais nettement l’impression que plusieurs des espèces observées l’étaient pour la dernière fois avant le printemps prochain.
À partir du quai, la visibilité sur le fleuve était typique des journées froides d’hiver, avec une belle netteté près du rivage, mais se dégradant rapidement à environ 1,5 kilomètre au large. Nous avons donc été contraints de laisser non-identifiés plusieurs oiseaux qui volaient trop loin au large, bien que nous sommes convaincus que la majorité devait être des Guillemots à miroir.
Nous avons passé trois heures à Rivière-Ouelle, dont près de deux heures accroupis sur nos petits bancs près du quai. Avec la difficulté que nous avons eu à nous relever après tout ce temps (nos jointures étaient littéralement figées par le froid!), il est plus que probable que nous laisserons nos bancs à la maison jusqu’au mois de mars prochain… Malgré toute notre bonne volonté, nous n’avons vu que 23 espèces (et pas de Fuligule à dos blanc) :
  • 9 Canards noirs
  • 150 Eiders à duvet – En vol vers l’ouest malgré le vent modéré du sud-ouest.
  • 1 Macreuse brune
  • 1 Garrot à œil d’or
  • 12 Grands Harles
  • 1 Harle huppé
  • 4 Plongeons catmarins – Plutôt tardifs!
  • 1 Buse pattue
  • 7 Goélands à bec cerclé
  • 8 Goélands argentés
  • 40 Goélands arctiques
  • 12 Goélands marins
  • 17 Guillemots à miroir
  • 40 Pigeons bisets
  • 23 Tourterelles tristes
  • 1 Geai bleu
  • 12 Corneilles d’Amérique
  • 4 Grands Corbeaux
  • 85 Étourneaux sansonnets
  • 36 Jaseurs boréaux
  • 100 Plectrophanes des neiges
  • 2 Sizerins flammés
  • 17 Moineaux domestiques
Avec un peu de chance (du temps doux et peu de neige peuvent aussi aider), nous espérons continuer à trouver quelques oiseaux intéressants au large du quai de Rivière-Ouelle jusqu’à la toute fin de l’année. Et pourquoi pas un Fuligule à dos blanc…?

lundi 5 décembre 2011

Macreuses et pingouin

Finalement, la neige est arrivée! Pas en grande quantité, mais un petit deux centimètres est finalement tombé sur La Pocatière vendredi le 2 décembre. Cette première accumulation de neige de l’hiver nous arrive avec près d’un mois de retard. Si on oublie le tort que de tels changements climatiques peuvent avoir sur l’ensemble de l’environnement, on pourrait presque en être heureux… sauf qu’à l’autre bout, j’ai remarqué que le printemps arrive lui aussi plus tardivement!
À chaque début d’hiver, le jeu pour plusieurs est souvent d’essayer d’ajouter quelques espèces tardives à sa liste hivernale. Avec l’automne qui s’étire de plus en plus loin en décembre, les années où je ne réussis pas à ajouter une espèce à ma trop courte liste hivernale sont plutôt rares.

Malheureusement, très malheureusement, une situation vraiment hors de notre contrôle a une fois de plus réduit notre fin de semaine ornithologique à une seule vraie journée. Malgré cela, samedi le 3 décembre, nous nous sommes empressés de faire une petite sortie matinale de deux heures autour de la ville, question d’au moins jeter un petit coup d’œil aux oiseaux que l’on allait manquer durant cette très belle journée. Les espèces observées nous auraient bien donné le goût de rester à l’extérieur plus longtemps… :
  • 1 Canard d’Amérique – Ma première mention à vie en décembre! Ne riez pas!… les canards barbotteurs quittent toujours rapidement ma région et puisque je n’observe que rarement à l’extérieur, je dois me passer des oiseaux que d’autres voient facilement ailleurs…
  • 1 Canard noir
  • 54 Canards colverts
  • 210 Pigeons bisets – Tout comme les canards, les pigeons semblaient très nerveux en ce début d’avant-midi. Nous n’avons pas eu la chance de trouver la source de tout ce stress…
  • 38 Tourterelles tristes – Les tourterelles étaient plutôt rares depuis un mois. La petite couche de neige au sol semble les avoir forcé à quitter les champs et se réfugier près des mangeoires dans la ville.
  • 3 Pics mineurs
  • 6 Geais bleus
  • 25 Corneilles d’Amérique
  • 5 Grands Corbeaux
  • 21 Mésanges à tête noire
  • 2 Sittelles à poitrine rousse
  • 100 Étourneaux sansonnets
  • 13 Jaseurs d’Amérique
  • 36 Plectrophanes des neiges
  • 2 Juncos ardoisés
  • 4 Chardonnerets jaunes
  • 17 Moineaux domestiques
Dimanche le 4 décembre, comme la semaine dernière, rien n’aurait pu nous empêcher de passer une bonne partie de la journée à l’extérieur. Comme tout est plutôt calme chez les oiseaux forestiers et qu’il reste encore quelques oiseaux aquatiques à inspecter avant l’arrivée des grands froids, c’est vers Rivière-Ouelle que nous nous sommes dirigés.
Sur place, malgré les vents forts du sud, les conditions d’observation étaient encore très acceptables, autant pour la visibilité que pour le confort des observateurs (une fois bien abrités). Je parlais tout à l’heure de l’arrivée tardive de l’hiver depuis quelques années, je ne peux donc  m’empêcher de me rappeler la sortie du 7 décembre 1985 à Rivière-Ouelle. À mon arrivée au quai ce matin-là, j’avais constaté que le fleuve était complètement recouvert de glace! Pas la moindre goutte d’eau n’était visible à partir du quai! Je n’avais vu qu’un seul laridé, un « Goéland à manteau noir », et un petit groupe de 30 Eiders à duvet qui volaient en zigzag au-dessus des glaces en cherchant un trou d’eau où se poser. Il faut dire que c’était un début d’hiver particulièrement agressif… Mais, cette année, il n’y avait pas un seul morceau de glace flottant sur le fleuve et même le rivage, où la glace fige rapidement à la limite de la marée haute, était presqu’entièrement dégagé.

Durant les cinq heures passées à Rivière-Ouelle, nous avons observé :
  • 5 Oies des neiges
  • 52 Canards noirs
  • 1 Canard colvert
  • 69 Eiders à duvet
  • 3 Macreuses à front blanc – Mes plus tardives à vie dans la région mais je suis encore loin de mon record absolu, d’un oiseau qui était demeuré aux Escoumins jusqu’au 27 décembre 1996!
  • 18 Macreuses brunes
  • 37 Macreuses à bec jaune
  • 2 Garrots à œil d’or
  • 4 Grands Harles
Grand Harle – Rivière-Ouelle – 4 décembre 2011 © Claude Auchu 
  • 1 Buse pattue
  • 35 Goélands à bec cerclé
  • 20 Goélands argentés
  • 30 Goélands arctiques
  • 5 Goélands marins
  • 1 Petit Pingouin – Mon premier à vie en décembre, faisant suite à un automne particulièrement riche pour cet alcidé.
  • 1 Guillemot à miroir – Pour cet autre alcidé qui atteint habituellement son pic d’abondance à la fin de novembre, la quantité est très faible. C’est peut-être dû au vent du sud soufflant avec vigeur.
  • 95 Pigeons bisets
  • 5 Tourterelles tristes
  • 1 Harfang des neiges
Peut-être intimidés par un environnement qu’ils ne connaissent pas, les premiers Harfangs des neiges observés chaque automne sont souvent trouvés cachés au sol dans les labours
Rivière-Ouelle – 4 décembre 2011 © Christiane Girard
  • 1 Pie-grièche grise
  • 2 Geais bleus
  • 21 Corneilles d’Amérique
  • 6 Grands Corbeaux
  • 7 Mésanges à tête noire
  • 4 Sittelles à poitrine rousse
  • 135 Étourneaux sansonnets
  • 45 Plectrophanes des neiges
  • 30 Moineaux domestiques
Avec aussi peu de neige au sol (qui a d’ailleurs fondu avant le début de la semaine suivante) et une température qui ne descend que rarement sous le point de congélation, on peut espérer qu’il nous reste encore de belles sorties au fleuve. D’un autre côté, les fringillidés ont littéralement disparu des basses-terres de la région. J’attendrai l’arrivée de la neige avant d’aller vérifier s’ils sont vraiment cachés dans les forêts de conifères de l’arrière-pays. Nous aurons bien le temps pour ça!