lundi 19 mars 2012

Records ornithologiques et... météorologiques

Ce fut une de ces fins de semaine où les éléments semblaient se liguer contre nous! Depuis plusieurs jours, on nous annonçait une température extrêmement douce avec très peu de précipitations pour la fin de semaine. J’étais donc convaincu de battre plusieurs de mes dates records d’arrivée que je tiens à jour, uniquement pour mon plaisir, depuis 1978. Effectivement, la température extérieure a été TRÈS au-dessus de la normale, mais cette douceur peut apporter certains désagréments. Et justement, samedi, un brouillard à couper au couteau a perduré jusqu’au début de l’après-midi! Dimanche, après des orages électriques (!) en fin de nuit, ce fut un violent vent chaud du sud avec lequel nous avons eu à négocier.

Samedi le 17 mars, mon sommeil toujours léger a été interrompu à 5 h 25 par les cris d’un corneille insomniaque. Lorsque des Corneilles d’Amérique crient ainsi 1 h 15 avant le lever du soleil, on peut aisément comprendre que les hormones de ces oiseaux sont en ébullition! La journée s’annonçait donc très bien! Mais, comme je l’avais prévu la veille, la chaleur extrême et la neige à fondre ont formé un épais brouillard tout le long de la vallée du Saint-Laurent. Malgré cela, notre enthousiasme est tout aussi débordant que les hormones le sont chez les corneilles, nous sommes rapidement descendus sur les battures du fleuve, en espérant que le soleil dissipe le brouillard le plus vite possible. Malheureusement, ce ne fut pas vraiment le cas. À vrai dire, près du fleuve comme ailleurs, on ne voyait ni ciel, ni terre, ni mer… Même les oiseaux semblaient un peu perdus; des tarins, des sizerins et un Bec-croisé bifascié ont pu être trouvés sur les battures, loin de tout vrai conifère digne de ce nom!
Les canards souhaités, s’ils étaient sur place, étaient trop loin dans la brume pour que nous puissions les voir. Seuls quelques goélands nous ont survolé avec hésitation… visiblement, ce n’était pas sur les battures que nous allions battre un quelconque record. Nous sommes donc revenus bredouilles à la maison en continuant d’espérer que l’après-midi serait meilleur.
Le temps était à peine plus clair lorsque nous sommes retournés sur le terrain. Cette fois, au départ, nous avions déjà quelque chose à fêter : c’était notre première sortie officielle à vélo de l’année! Pour des ornithologues cyclistes comme nous, la première randonnée à vélo a toujours une grande signification : maintenant, c’est vrai, le printemps est arrivé!!!
Cependant, si la liste d’oiseaux s’est allongée, les quantités n’étaient pas au rendez-vous. Malgré cela, nous avons eu une petite surprise que je qualifierais de « non-cochable » : nous avons nettement entendu le cri d’un Faisan de Colchide depuis une zone buissonneuse située en bordure de la ville. Nous savons qu'un individu a été vu à une mangeoire tout près de cet endroit à la fin de décembre dernier. Ce qui signifie donc que le faisan a hiverné avec succès à La Pocatière?!?
Samedi soir, les dernières prévisions météorologiques annonçaient un petit millimètre de pluie durant la nuit. Nous avons donc été plutôt surpris de nous faire réveiller vers 3 h 30 du matin par un orage électrique! Et par un vent à écorner les alouettes! Ça regardait mal pour notre sortie matinale… encore une fois. Mais, une fois la pluie terminée, tant pis pour le vent, en route pour Rivière-Ouelle!

Malgré les vents de 50 km/h et les rafales, dimanche le 18 mars, nous nous sommes dirigés vers le fameux quai. Sur place, les oiseaux bougeaient d’une manière plutôt spéciale. Nous avons l’habitude de scruter attentivement le large pour y déceler les oiseaux circulant le plus loin possible. De toute façon, nous disons-nous, les espèces qui longent le rivage (les canards barbotteurs et les oies) seront relativement faciles à repérer. Mais, en ce dimanche particulièrement venteux, la stratégie de déplacement des oiseaux n’était visiblement pas dans les normes. Premièrement, très peu d’oiseaux se déplaçaient au large, ce qui, à premier abord, est inhabituel! Deuxièmement, les quelques canards en migration survolaient le rivage et toujours en très petit groupe! La matinée semblait donc destinée à être presque aussi tranquille que la précédente. Après 90 minutes, nous avons décidé de vérifier si les canards ne se cachaient pas dans les champs. C’est en faisant cette tournée que nous avons compris la stratégie des canards en cette matinée très venteuse : les oiseaux survolaient carrément les champs à très haute altitude sans même s’y arrêter! Visiblement, les vents les dérangeaient et ils n’osaient même pas lutter contre eux en bordure du fleuve.

Nous avons fini par trouver un endroit près de la rivière Ouelle où les anatidés étaient un peu plus concentrés, avec quelques-uns à l’eau et de belles quantités en vol. C’est à cet endroit que la majorité des oiseaux observés durant la sortie ont été notés :
  • 1 Oie des neiges
  • 230 Bernaches du Canada – Ma date d’arrivée la plus hâtive dans la région, battant par deux jours la date de 2010. Le record de 2010, lui, battait un vieux record datant de 1986! Oui, les oies arrivent tardivement dans ma région!
  • 25 Canards noirs
  • 37 Canards colverts
  • 45 Canards pilets – Un autre nouveau record d’arrivée. Il faut noter que j’ai déjà vu l’espèce plus hâtivement encore à Bergeronnes et qu’un mâle s’est même permis d’hiverner aux Escoumins en 2001-2002 (en plus de l’oiseau vu à Dégelis en février 2011). De toute évidence, l’espèce, comme plusieurs autres anatidés, hiverne de plus en plus loin au nord!
  • 1 Sarcelle d’hiver – Une autre espèce qui se présente à une nouvelle date hâtive dans ma région.
  • 9 Fuligules milouinans – Ce canard aussi hiverne de plus en plus loin au nord. Une belle bande fréquente depuis déjà quelques années l’embouchure de la rivière Saguenay durant la saison froide. Localement, nous avions déjà vu un individu à Rivière-Ouelle le 14 janvier 2007.
  • 1 Macreuse à bec jaune
  • 16 Garrots à œil d’or
  • 11 Grands Harles
  • 2 Harles huppés
  • 1 Épervier brun
  • 3 Pluviers kildirs
  • 80 Goélands à bec cerclé
  • 22 Goélands argentés
  • 3 Goélands arctiques
  • 21 Goélands marins
  • 3 Pigeons bisets
  • 1 Tourterelle triste
  • 1 Harfang des neiges – Comme les premiers arrivant à l’automne, les tout derniers du printemps sont souvent bien camouflés au sol en bordure des champs, à l’abri des corneilles.
  • 1 Geai bleu
  • 115 Corneilles d’Amérique
  • 4 Grands Corbeaux
  • 1 Mésange à tête noire
  • 5 Merles d’Amérique
  • 85 Étourneaux sansonnets
  • 7 Carouges à épaulettes
  • 23 Quiscales bronzés
  • 75 Sizerins flammés
Fin de semaine étrange! J’espérais des records d’arrivée ou d’abondance chez nos oiseaux, mais les records de chaleur et de date hâtive pour un orage électrique nous ont probablement encore plus marqué (comme ce message le laisse voir!). Mais, honnêtement, la variété des espèces, l’état des glaces sur le fleuve et les battures (en fait, il n’y en a carrément plus !) et la température laissait croire que nous étions le 10 avril.