mardi 25 octobre 2016

Carouge à tête jaune dans la tempête!

Que d’eau, que d’eau! Est-ce qu’il a plu chez vous ces derniers jours? Ici, il a plu à torrents, ce qui a bien sûr grandement compromis nos excursions de la fin de semaine. Nous nous sommes débrouillés de notre mieux pour ne pas tout rater; alors, peu importe la pluie et le vent, nous sommes allés aux oiseaux!
Durant la nuit de vendredi à samedi, nous avons connu une vraie tempête automnale. Plus de 50 mm de pluie sont tombés sur la région accompagnés de vents du nord-est dépassant les 50 km/h! Je n’ai pu m’empêcher d’avoir une petite pensée pour les pauvres oiseaux des terrains ouverts qui ont dû trouver cette nuit épouvantable!

Mais allait-il être possible pour nous de partir, samedi matin, à la recherche de nos chers oiseaux? Nous avons été presque surpris de constater au petit matin que la pluie forte s’était transformée en simple bruine. Les vents étaient toujours aussi puissants mais, au moins, ils provenaient du « bon bord »! En plus, les images satellites montraient une zone sans fortes précipitations pour la région. Alors, en quelques minutes, jumelles et télescopes étaient rassemblés et nous avons pris la route pour Rivière-Ouelle! Avec ces conditions minimales, on ne s’attendait pas à de grandes quantités d’oiseaux mais, comme je l’avais dit à Christiane au départ : « Il suffit parfois d’un seul oiseau pour qu’une sortie ordinaire devienne extraordinaire ».
Au quai, la visibilité était souvent limitée par la brume, mais le vent poussait les petites gouttes de pluie à l’horizontale et, collés contre un abri, nous étions relativement au sec. De toute façon, il aurait été impossible de nous installer sur le quai qui était régulièrement traversé par les vagues! Un spectacle magnifique d’une mer en furie!!!
Les vagues envahissent le quai!
Rivière-Ouelle – 22 octobre 2016 © Claude Auchu
Les oiseaux circulaient souvent un à un, seules quelques macreuses ont été vues en petits groupes. Voici un aperçu des quelques espèces rencontrées à Rivière-Ouelle samedi le 22 octobre :
  • 1 Fuligule à collier
  • 1 Fuligule milouinan
  • 7 Eiders à duvet
  • 9 Macreuses à front blanc
  • 3 Macreuses brunes
  • 3 Macreuses à bec jaune
  • 2 Hareldes kakawis
  • 1 Garrot à œil d’or
  • 2 Harles huppés
  • 3 Plongeons catmarins
  • 1 Grèbe jougris
  • 22 Cormorans à aigrettes – Ils ont été relativement discrets cet automne avec un petit maximum de seulement 540 oiseaux le 27 août dernier. Habituellement, nous réussissons à dépasser le millier d’individus à une ou deux reprises à chaque automne. Les cormorans ont dû migrer en masse en milieu de semaine…
  • 2 Grands Hérons
  • 1 Petit Pingouin

Nous avons ensuite fait un petit détour par Kamouraska où les conditions n’étaient pas plus favorables. Les limicoles étaient très bien cachés du vent (peut-être à la pointe ouest des îles?), nous n’avons trouvé que des miettes :
  • 4 Pluviers argentés
  • 2 Pluviers semipalmés – Nos derniers de l’année?
  • 19 Bécasseaux sanderlings
  • 30 Bécasseaux variables

Mais où peuvent bien se cacher les plongeons et les canards de mer durant de telles journées? Sûrement pas à l’abri dans une baie que ces oiseaux semblent éviter en toutes circonstances…! Ou bien très loin au large, parmi les vagues? Peut-être, après tout, c’est ce qu’ils font dans l’océan durant l’hiver!
Malgré cette maigre récolte, le moral était encore bon à notre retour à La Pocatière. Tout juste avant d’atteindre la ville, nous avons entrevu un important groupe de Carouges à épaulettes qui se nourrissaient dans un champ de maïs partiellement fauché. Un rapide détour et nous étions stationnés prudemment à l’entrée du champ. Des centaines de carouges volaient en tous sens, certains venant se poser dans la partie fauchée du champ tout juste devant nous, d’autres retournant se protéger du vent dans les rangs de maïs! À notre grande surprise, plusieurs carouges prenaient même un bain dans les flaques d’eau, comme s’ils n’avaient pas été assez arrosés durant la nuit?!? Christiane, toujours amatrice de grand nombre, regardait partout en essayant d’évaluer le plus précisément possible la quantité de carouges présents. Une tâche plutôt ardue puisque les oiseaux n’étaient jamais tous visibles au même moment. Son décompte s’est finalement terminé à 3000 individus, un nombre qu’elle considérait encore conservateur!
C’est alors que la surprise tant espérée est apparue devant nous : un Carouge à tête jaune était posé au sol à une soixantaine de mètres de notre position!!! Il s’agissait d’un magnifique mâle adulte avec la tête et le haut de la poitrine jaune et une ligne blanche horizontale bien visible le long de l’aile, formée par les couvertures primaires. Ce rare visiteur est demeuré devant nous durant près d’une minute durant laquelle il a changé de place à deux reprises. Alors que j’essayais sans succès de le photographier, il a finalement disparu dans le champ de maïs. C’est avec une nervosité extrême que nous l’avons cherché longuement parmi les centaines de carouges qui allaient et venaient. Nous l’avons finalement retrouvé alors qu’il allait se cacher dans un petit boisé de conifères au milieu du champ. À ce moment, nous avons été particulièrement surpris de constater qu’en vol, les couvertures primaires blanches étaient nettement plus apparentes que sa tête jaune. Malgré de fréquents passages dans ce secteur durant le reste de la journée de même que dimanche, les carouges encore sur place se trouvaient toujours à l’autre extrémité du champ, dans un secteur inaccessible par cette météo exécrable!
Avec trois ou quatre mentions au Québec à chaque année, le Carouge à tête jaune est une des espèces du centre du continent qui nous visite avec le plus de régularité. Pour le territoire de Kamouraska-L’Islet, il ne s’agit tout de même que de la troisième mention connue. Le 19 septembre 1932, « par gros temps, de vent et de pluie », l’abbé René Tanguay capturait une femelle sur les battures du fleuve à La Pocatière pour la première régionale et la quatrième au Québec à ce moment. Un mois plus tard, l’abbé Tanguay avait présenté un texte sur cette capture au congrès de l’American Ornithologists’ Union tenu à Québec. La deuxième mention concerne un oiseau, peut-être un mâle immature, présent brièvement à Rivière-Ouelle le 21 juin 1994.
Il s’agit de ma première rencontre avec un Carouge à tête jaune, une espèce que j’avais en tête depuis très longtemps! Au fil des ans, j’aurais facilement pu l’ajouter à ma liste en allant voir des oiseaux trouvés légèrement en dehors de ma région. Mais c’est toujours tellement plus excitant de le trouver soi-même!!! Il s’agit tout de même de mon deuxième « lifer » en six mois, après le Guillemot de Brünnich de mai dernier. Ce n’est pas si mal : j’ai déjà passé plus de trois ans sans nouveauté!

Dimanche matin, après une autre nuit de forte pluie, nous sommes retournés à Rivière-Ouelle. Le vent avait tourné au sud-ouest tout en demeurant aussi puissant que la veille. Peu d’oiseaux étaient au rendez-vous, mais nous avons tout de même trouvé nos deux premiers Bécasseaux violets de l’automne.
Cette fois, ce fut vrai : un seul oiseau a sauvé notre fin de semaine!!! Merci au Carouge à tête jaune et espérons que nous réussirons à le retrouver!