mardi 13 décembre 2016

Pas de Mergule nain… mais un Cardinal à poitrine rose!

Cette dernière fin de semaine représentait probablement notre dernière chance de trouver une espèce particulière qui manque encore à notre liste annuelle. Cette espèce est le Mergule nain, un minuscule membre de la famille des pingouins et macareux qui niche sur les côtes les plus septentrionales du Groenland et de quelques îles au nord de la Russie. Certains automnes, de nombreux mergules pénètrent dans le fleuve Saint-Laurent et quelques oiseaux réussissent même à se rendre jusqu’à la hauteur de Rivière-Ouelle! Depuis ma première mention en 1986, j’ai réussi à trouver l’espèce dans la région au cours de dix automnes, dont quatre depuis 2010. Malheureusement, peu d’individus ont été observés dans le Saint-Laurent en 2016. Nous aurions pourtant bien aimé l’ajouter à notre liste, ne serait-ce que pour nous vanter d’avoir vu les six espèces d’alcidés du Québec à partir du quai de Rivière-Ouelle au cours d’une même année. Puisque nous avons le Guillemot de Brünnich cette année (et deux fois plutôt qu’une!), l’espèce la plus difficile à voir dans la région, trouver un mergule aurait bien fait notre affaire.
Pour ceux qui voudrait se risquer à chercher le Mergule nain dans la région, mes dix observations ont été faites entre le 27 octobre et le 1er décembre et sont concentrées plus particulièrement dans les deux dernières semaines de novembre. Je n’ai jamais vu l’espèce à plus d’une occasion au cours d’un automne, mais nous avons déjà vu cinq oiseaux durant une même matinée. Les mergules ont toujours été vus circulant loin au large du quai de Rivière-Ouelle, sauf un trouvé près du rivage à La Pocatière le 22 novembre 2003. De son côté, l’abbé René Tanguay mentionne des spécimens capturés à Saint-André le 20 décembre 1949 et un autre à La Pocatière le 19 novembre 1959. Je crois me souvenir que ce dernier spécimen aurait été trouvé en bordure de la voie ferrée qui, à son point le plus près, se trouve ici à deux kilomètres du fleuve.

Samedi matin, nous avions encore espoir de trouver un Mergule nain à Rivière-Ouelle. La température qui avait plongé jusqu’à -15°C durant la nuit avait figé le rivage et la rivière sous les glaces, mais le fleuve était encore entièrement dégagé. Je le sais par expérience, une température trop froide n’encourage pas les oiseaux marins à se déplacer. Il y a sûrement encore des oiseaux marins dans la région, mais il faudra attendre le retour des températures de saison pour pouvoir le confirmer.

Samedi le 10 décembre, notre récolte d’oiseaux à Rivière-Ouelle s’est limitée à ces 19 espèces, trouvées entre 6 h 50 et 10 h 35 :
  • 2 Oies des neiges – Un passage rapide à Rivière-Ouelle vendredi après-midi m’avait permis de voir 24 Oies des neiges, mais seulement deux étaient encore visibles samedi matin. Il faut dire que le froid avait totalement changé l’allure de la rivière en moins de 18 heures!!!

Oies des neiges (Snow Geese – Chen caerulescens)
Rivière-Ouelle – 10 décembre 2016 © Christiane Girard
  • 14 Canards noirs
  • 140 Eiders à duvet – Avec des vents du nord froids mais faibles (heureusement!) et une marée montante, il n’était pas surprenant de voir quelques petits groupes d’eiders remonter le fleuve. Certaines années, des eiders peuvent être vus à Rivière-Ouelle jusqu’au début de janvier.
  • 11 Grands Harles
  • 1 Plongeon huard
  • 4 Guillemots à miroir
  • 7 Goélands à bec cerclé – Lorsque Christiane prend le temps de compter tous les goélands un à un, c’est que le nombre d’individus de toute espèce confondue est vraiment bas!
  • 58 Goélands argentés
  • 7 Goélands arctiques
  • 28 Goélands marins – À notre arrivée au quai, trois goélands étaient posés à l’eau et frappaient à grands coups de bec quelque chose qui flottait près d’eux. Aux télescopes, c’est presque avec soulagement que nous avons pu confirmer qu’il ne s’agissait que d’un simple canard de plastique!
  • 15 Pigeons bisets
  • 2 Tourterelles tristes
  • 5 Geais bleus
  • 2 Corneilles d’Amérique
  • 12 Mésanges à tête noire
  • 27 Étourneaux sansonnets
  • 7 Durbecs des sapins
  • 6 Chardonnerets jaunes – Tous présents à une même mangeoire.

Auparavant, vendredi soir, j’avais reçu un courriel d’un résident de La Pocatière m’annonçant qu’un Cardinal à poitrine rose mâle fréquentait ses mangeoires! La présence de cette espèce dans la région en décembre étant tout à fait exceptionnelle, nous avions bien l’intention d’aller jeter un coup d’œil à l’oiseau, s’il réussissait à survivre à la nuit glaciale!!! Samedi, au retour de Rivière-Ouelle, un détour par ces mangeoires bien garnies en nourriture et en oiseaux nous a permis de photographier ce courageux visiteur.

Sur le territoire de La Pocatière, nous avons donc observé :
  • 7 Pigeons bisets
  • 43 Tourterelles tristes – Un beau rassemblement comme nous n’en avions pas vu depuis une dizaine d’années!
  • 1 Pic chevelu
  • 12 Geais bleus
  • 2 Grands Corbeaux
  • 5 Mésanges à tête noire
  • 1 Étourneau sansonnet
  • 1 Cardinal à poitrine rose – Le Cardinal à poitrine rose est un nicheur migrateur commun dans la région. Arrivant à la mi-mai, il nous quitte l’automne dès la mi-septembre. La présence la plus tardive dont j’ai été témoin remonte au 21 septembre 1983!!! Je n’ai donc jamais vu l’espèce ni en octobre ni en novembre! En fait, il est bien possible que l’oiseau trouvé à La Pocatière ait quitté son aire de nidification en septembre tout comme ses congénères, mais qu’il ait ensuite remonté vers le nord comme plusieurs oiseaux désorientés le font tard en automne. Dans ce sens, il n’aurait pas été beaucoup plus surprenant qu’il se soit agit d’un Cardinal à tête noire, le pendant de l’ouest du continent du Cardinal à poitrine rose. Nous avons d’ailleurs déjà observé cette espèce à La Pocatière, les 21 et 22 novembre 2003!

Cardinal à poitrine rose (Rose-breasted Grosbeak – Pheucticus ludovicianus
et Gros-bec errant (Evening Grosbeak – Coccothraustes vespertinus)
La Pocatière – 10 décembre 2016 © Claude Auchu
Les rémiges et couvertures alaires noir et blanc sans aucune plume brune indiquent un mâle âgé d’au moins deux ans. 
Les mentions de mâle adulte de Cardinaux à poitrine rose semblent plutôt rares au Québec aussi tard en saison.
Cardinal à poitrine rose (Rose-breasted Grosbeak – Pheucticus ludovicianus)
La Pocatière – 10 décembre 2016 © Claude Auchu
  • 9 Durbecs des sapins
  • 1 Chardonneret jaune
  • 18 Gros-becs errants

Même si la température était à peine plus chaude dimanche matin, nous sommes tout de même retournés à Rivière-Ouelle, toujours en espérant voir un mergule. Il y avait encore moins de mouvement que la veille, surtout du côté des goélands, mais nous avons croisé quelques Macreuses à bec jaune.

À Rivière-Ouelle, dimanche le 11 décembre, nous avons observé ces 15 espèces entre 7 h 50 et 9 h 55 :
  • 6 Oies des neiges – Quatre oies de plus qu’hier! Où étaient-elles donc cachées 24 heures plus tôt? Peut-être dans un champ où la nourriture est sûrement plus facile d’accès que sur les rives du fleuve ou de la rivière.
  • 310 Eiders à duvet
  • 4 Macreuses à bec jaune
  • 3 Harles huppés
  • 1 Mouette tridactyle – Un adulte remontait le fleuve.
  • 4 Goélands à bec cerclé
  • 4 Goélands argentés
  • 7 Goélands arctiques
  • 7 Goélands marins
  • 6 Pigeons bisets
  • 1 Pic chevelu
  • 1 Corneille d’Amérique
  • 17 Mésanges à tête noire
  • 45 Étourneaux sansonnets

Nous n’avons donc pas réussi à voir le Mergule nain tant souhaité. Mais nous avons eu l’opportunité de voir un Cardinal à poitrine rose en plein mois de décembre! Comment aurions-nous pu prévoir un tel dénouement à notre fin de semaine? Il faut dire que nous traitons avec des êtres vivants qui sont dépendants des conditions extérieures (météo, disponibilité de la nourriture…) et qui prennent des décisions qui ne sont pas toujours les plus logiques (tout comme nous!). Présentement, il y a au Québec sûrement plus d’oiseaux rares que d’observateurs. La meilleure chose à faire pour entrer en contact avec eux est simplement d’être sur le terrain avec l’esprit ouvert, d’être prêts à tout!